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« Il n’y a pas lieu de choisir entre local et global »

Interview de Matthieu Belloir, directeur de la RSE du groupe Orange.

 

Interview parue dans le n°43 de Décisions durables

 

Comment le groupe Orange a été impacté par la crise du Covid ?

Nous avons dû faire face à une forte hausse du trafic liée à la digitalisation à marche forcée des échanges sociaux et marchands : télétravail, e-commerce, enseignement à distance,

télé-médecine, streaming de contenus audiovisuels… En Afrique, nous avons enregistré des hausses de 15 à 50 % selon les pays, ce qui a nécessité d’augmenter très rapidement la capacité de nos câbles sous-marins. Au final, les réseaux ont tenu et la qualité de service a été au rendez-vous tout au long du confinement. Cette capacité d’adaptation est inhérente à notre métier, dans un contexte où le volume de données échangées sur les réseaux mobiles augmente de 40 % chaque année. En interne, près de 100 000 salariés, soit 70 % de nos effectifs, ont travaillé à distance pendant le confinement. Ce passage à un télétravail massif a été facilité par une pratique déjà bien ancrée et la mise en place de modes de décision, d’information et de collaboration adaptés.


En tant qu’entreprise globale êtes-vous inquiet de la montée des protectionnismes ?

Nous constatons, comme chacun, que la crise peut générer des tendances au repli. Les raisons sont multiples :

  • en positif, on aspire à des circuits courts avec un impact environnemental réduit ;

  • en négatif, les logiques économiques exclusives de « préférence nationale » et de fermeture aux échanges gagnent du terrain.

Nous voyons aussi se développer les débats autour de la souveraineté numérique, que ce soit à l’échelle nationale ou européenne. À nos yeux, il n’y a pas à choisir entre global et local. La réussite du modèle Orange à l’international montre que les deux options sont conciliables et complémentaires. On peut bénéficier des effets d’échelle d’un grand groupe et ajuster sa stratégie d’action au plus près des marchés. Dans une économie mondialisée, les vraies questions sont celles de l’équilibre et de la réciprocité. D’ailleurs, la crise sanitaire a montré que face au risque et à l’incertitude, nous sommes tous concernés et interdépendants. Une réponse efficace ne peut être que collective.


Certains voient " le monde d’après" comme celui du capitalisme numérique. Qu’en pensez-vous ?

Il est clair que la crise que nous traversons va de pair avec une accélération de la transformation digitale de bon nombre d’activités humaines : grâce au numérique, le lien social et une partie de l’activité économique ont pu être maintenus. Elle a aussi mis en lumière à quel point l’accès au numérique est devenu un enjeu sociétal majeur. Ne pas y avoir accès, c’est être condamné à une forme d’exclusion sociale. Le capitalisme numérique peut être une source d’opportunités et de menaces. C’est d’ailleurs pour cela que des dispositifs de régulation se mettent en place (par exemple le RGPD en Europe). La vraie question est celle du capitalisme responsable. C’est le sens :

  • de notre raison d’être que nous venons d’intégrer à nos statuts : « un acteur de confiance qui oeuvre pour donner accès à chacune et chacun les clés d’un monde numérique responsable » ;

  • mais aussi des actions concrètes que nous menons pour favoriser l’inclusion numérique, sensibiliser à un usage responsable du numérique, développer l’économie circulaire…

Et puis n’oublions pas les formidables opportunités que porte le numérique. Par exemple en Afrique, c’est un réel levier pour faire face aux immenses besoins de services, en raison d’un déficit d’infrastructures traditionnelles et d’une croissance démographique sans précédent.

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